Jean Laurent a écrit « Tocsins et carillons », un « plaidoyer pour Sainte-Ménehould », comme il l’a écrit lui-même sur la page de couverture, un plaidoyer pour l’Argonne aussi.
Au gré des pages, on va de Verrières à Clermont ou encore à Saint-Rouin et c’est à chaque fois l’occasion d’asséner quelques vérités. A Verrières, Jean Laurent enchaîne avec une réflexion sur le patronat : « Que l’ouvrier est un compagnon, un travailleur », dans la page sur Villers, il parle de religion On a l’impression que « Tocsins et carillons » a été écrit hier. C’était pourtant en 1987. Voici un exemple, la page 73 : « L’Argonne n’existe pas » ; avec une ligne tellement d’actualité : « La télévision nationale n’en parle guère (de l’Argonne) que le 11 novembre ». Combien de bénévoles d’Argonne qui organisent aujourd’hui des manifestations dignes d’intérêt n’ont jamais eu droit à la télé. Pour donner un exemple, c’est en Argonne qu’ont eu lieu les premiers « brâmes du cerf ». Et les reportages télé sont toujours ailleurs
Une tache verte dans l’hexagone.
L’Argonne n’existe pas
« A quelques pas de la croix portant l’inscription définitive »Ici était le Four de Paris« , hameau rayé de la carte, au lieu-dit : Fontaine aux Charmes, une quadruple limite administrative recoupe de ses pointillés l’empreinte de la »zone rouge« de guerre, tracée dans la forêt meurtrie. De toute évidence, il est hors de question d’envisager l’existence d’un Commissaire de la République, placé à la tête d’un »Département d’Argonne".
Cette vérité admise, ce malheureux pays n’est pas mieux traité par l’information, écrits et médias :
- quelques lignes seulement dans un dictionnaire, alors que la description la plus fidèle se trouve dans l’encyclopédie soviétique !
- « pays pauvre et dépeuplé », mais le texte est le même depuis soixante ans !
- la faculté elle-même nous apprend que « l’Argonne est, pour moitié tantôt champenoise, tantôt lorraine », et passe outre !
- la télévision nationale n’en parle guère que le 11 novembre ou lorsque le thermomètre chute au-dessous des limites acceptables !
Elle est
Sa mission suffirait à le démontrer, puisque les stratèges ont su tirer parti de ce môle chaque fois qu’il fallait barrer la route de la capitale. Réduire son rôle à cette conception militaire est bien trop restrictif.
Car, au-delà d’une géographie physique bien particulière, l’originalité de l’Argonne réside tant dans son histoire que dans son patrimoine, tant dans le genre de vie de ses habitants que dans ses manifestations.
Montez à Beaulieu un dimanche d’été. Ce sont toujours des Argonnais, familles et amis, qui se retrouvent là-haut. Simple gadget, le badge « Pays d’Argonne » figurant sur les pare-brise témoigne de leur appartenance au terroir des prairies nichées dans la forêt profonde.....
Jean Maigret