Le groupe Buirette est à vendre, mais pour les seniors, ce joli bâtiment est et restera l’école des filles. C’est là que se déroulaient les fêtes des écoles, à l’ombre des arbres de la cour, avec une rue qui, étant barrée, ne gênait pas la circulation.
Puis un jour ce fut la mixité, l’école des filles accueillit des élèves du sexe masculin et devint l’école Buirette, même si la rue portait le nom de rue Renard, tandis que l’école de garçons devint le groupe Camille Margaine, du nom de la rue.
C’est en 1920 que la ville a acheté les bâtiments pour en faire une école. A l’origine, le bâtiment avait été construit pour être une usine : la pastillerie Géraudel. Rappelons-le, le pharmacien ménéhildien, né à Bellefontaine, en pleine forêt d’Argonne, avait inventé une pastille pour soulager la toux, une pastille qui fit sa fortune. Après avoir œuvré rue Zoé Michel, Auguste Géraudel fut contraint, devant les ventes sans cesse grandissantes, de faire bâtir une usine. Ce sera juste derrière l’hôtel de ville, là où travailleront pas moins de 50 ouvriers et ouvrières.
Le bâtiment, réalisé en 1888 était doté des derniers perfectionnements : chauffage central au charbon, éclairage au gaz, ventilation. Le rez-de-chaussée où l’on accède par un escalier était la pastillerie proprement dite ; le premier étage abritait un logement avec cette espèce d’échauguette nommée aussi « petit pavillon » qui fait croire aux touristes qu’il y a là un reste de rempart. Il y avait aussi une grande salle et le laboratoire. Le grenier comportait une vaste salle de cinq pièces.
Le bâtiment en pierre, brique et pierre meulière pour l’aile rue Renard, a traversé les épreuves du temps sans dommages, preuve de la solidité de la construction. On déplorera seulement quelques dégâts causés par un obus pendant la première guerre mondiale.
Géraudel décéda en 1906. Après la grande guerre, l’usine déménagea en région parisienne et donc la veuve et les deux fils vendirent l’usine à la ville. Le maire de la ville, Charles Pougnant, premier magistrat de 1925 à 1937 (qui aura pour successeur Gaston Vatier) allait donc créer une école des filles qui, jusque-là, n’étaient pas scolarisées. « Rien n’est plus négligé que l’éducation des filles » a écrit Fénelon. Les lois scolaires de 1881-1882, puis le décret de 1924 allaient changer l’éducation des demoiselles, même si au début on leur apprenait plus à devenir des bonnes maîtresses de maison que des universitaires.
Restait à transformer une usine en école avec une échéance : le 1er mars 1927, dans l’adjudication des travaux parus dans le Journal de la Marne, on retrouvera les noms des entreprises de Menou que les anciens ont bien connu : Noël pour la maçonnerie, Dubois pour la charpente, parquets, menuiseries, alors que Bister et Chevalier de Givry n’ont pas été retenus, Lancelot pour la couverture, plomberie-sanitaire, Oudin qui n’a pas eu la vitrerie, Noël pour la démolition. Presque uniquement des Argonnais pour la création de cette nouvelle école des filles.
L’échéance du cahier des charges stipulait que les travaux devaient être terminés le 1er mars 1927. Apparemment il y eut des retards car l’inauguration eut lieu le dimanche 25 septembre de l’année. Baillon, dans son livre d’histoire de la ville, précise page 150 : « Sous la présidence de M. Rosset, directeur de l’enseignement primaire, accompagné de M. Margaine [1] député de la Marne, du préfet, du sous-préfet, M. Grimaud, de l’inspecteur d’académie et de M. Pougnant, maire ».
John Jussy