Non, les traditions, le folklore ne sont pas des choses du passé que l’on fait revivre épisodiquement dans des festivals ou des parcs d’attraction, voire dans des commémorations ciblées, bien au contraire !
De toute évidence les traditions continuent de se transmettre, de se renouveler quelquefois, de se moderniser, mais toujours dans l’esprit de bien connaître sa région... de l’aimer et de la défendre. Peut-être que les légendes marquent notre imaginaire et sous-entendent nos créations personnelles. De toute évidence, les veillées étaient comme les bâtisses des brandeviniers, des éléments incontournables des transmissions comme du folklore.
Aux veillées, l’ordre était presque immuable, sauf si le décès d’une personne connue intervenait. Bien évidemment, on rendait les honneurs au défunt, on l’encensait, on lui trouvait toutes les qualités, les défauts étaient pour demain, la nature humaine est ainsi faite.
Aussi, après avoir épuisé les nouvelles du pays, les cancans du village, on passait aux contes de fées, aux légendes, aux histoires de ce bon vieux temps où les bêtes parlaient. On posait des devinettes, des charades et on évoquait enfin pour clore la veillée des souvenirs terrifiants de la forêt d’Argonne avec ses sorciers, ses esprits mystérieux et ses brigands invincibles.
Les aventures de Jean de Biesme étaient un sujet intarissable. Ce brigand du moyen-âge avait si longtemps terrorisé les populations de l’Argonne que son souvenir laissait un grand froid. Jean de Biesme, fils d’une châtelaine de Cernay, avait, suivant la légende, fait un pacte avec Belzébuth ; avec de l’imagination, on indiquait le lieu où ce pacte avait été signé : le trou de l’enfer !
On parlait également avec force des brigands de la Coinche, on rappelait le souvenir des « Six frères », détrousseurs fameux qui finirent pendus à six arbres du chemin du Dormois (Sainte-Ménehould, Chaudefontaine, Braux-Sainte-Cohière).
Qui ne se souvient des humbles bâtisses de brandeviniers où l’on distillait les prunes, les pommes, les cerises, tous les fruits récupérés et laissés à la fermentation dans un tonneau. D’octobre à avril, un lieu convivial, un lieu d’écoute, un lieu de partage. Bien évidemment, dans ces lieux, on savait recevoir et apprécier.
Aujourd’hui, les veillées comme les brandeviniers ont disparu ou presque. Ces lieux étaient la rencontre nécessaire de nos traditions, de nos coutumes, de nos croyances, du partage de nos histoires.
Sans leur transmission, le folklore ne peut exister que si l’on n’oublie pas les objets populaires quelquefois délaissés, mais ô combien nécessaires ! Le folklore doit être partagé afin de ne pas disparaître, il ne se limite pas seulement aux récits légendaires mais peut être vécu au quotidien. Réciter à un enfant une comptine que nous avons apprise dans notre jeunesse, n’est-ce pas donner un peu de bonheur à un enfant et perpétuer le folklore ? A chacun d’apprécier.
Patrick Desingly, Président