Dans les années cinquante, le département de la Marne devint, selon l’Inspection Académique, déficitaire. Les écoles normales de Châlons-sur-Marne n’arrivaient plus à “ fournir nos écoles en maître. Alors, on fit appel à des jeunes, bac en poche, qui venaient du Sud ou de Paris et qui se trouvaient, du jour au lendemain, sans formation, dans nos écoles à classe unique. Certains sont restés et enseignent encore dans la région, d’autres ont regagné rapidement leurs régions ensoleillées.
Les fins limiers du journal ont retrouvé le grand jeune homme qui, à cette époque, attirait les regards des promeneurs de la rue Chanzy par sa haute stature et étonnait les supporters du Sporting Club Ménéhildien lorsqu’il gardait les buts : Daniel ORLUC.
Il arrive en septembre 1956 à Saint-Mard-sur-Auve. Il se souvient de l’accueil chaleureux des parents de ses huit élèves qui l’hébergeaient au déjeuner, voire au dîner, de peur qu’il s’en aille. Le voisinage de la famille BREMONT, en poste à AUVE, était un encouragement. Ainsi, il a pu faire preuve, devant l’Inspecteur primaire, de sa maîtrise d’une classe unique avec “ thèmes en tiroir .
A la rentrée suivante, il est “ Directeur à deux classes à Saint-Remy-sur- Bussy, avec comme collègue, une jeune institutrice parisienne. Il prend pension à l’épicerie auberge et arrondi son traitement par le secrétariat de mairie, la surveillance des études et le balayage des classes. C’est l’année de ses premiers succès (entrée en 6ème, Certificat d’Etudes).
Il se souvient d’un jeune hyper intelligent mais rencontrant des difficultés d’expression qui l’amènent à consulter un spécialiste à l’hôpital TROUSSEAU. Qu’est-il devenu ? En lisant ces lignes, il apprendra qu’il est mort prématurément en 1969, à 18 ans.
Daniel ORLUC partage la vie du village : arrachage de betteraves, ramassage des gerbes à la tâche, coupe de bois. Il suit la coupe du monde en Suède devant la télé du boulanger.
En 1958, on le retrouve à la tête de la classe unique à ARGERS (42 élèves). Il découvre la forêt d’Argonne, les pieds de cochon. Il bataille avec le maire du village sur l’utilisation des crédits “ Barangé qui pouvaient être orientés vers l’enseignement libre.
En 1959, c’est le service militaire. En 1961, retour dans la Marne, pour un an, à Epernay et puis le départ pour d’autres métiers et d’autres cieux.
Rien de bien original que tout cela, direz-vous ? Mais la carrière de l’Argonnais d’adoption ne va pas s’arrêter là. Les lecteurs de l’Equipe savent qu’il va devenir un joueur de rugby de talent, un deuxième ligne redouté, le géant ORLUC, qui fera les beaux jours du club de Tulle, club de 1ère division. Il se disait même qu’il frappait à la porte de l’équipe de France. Mais sa plus grande réussite, il l’a doit à sa profession. Agent d’assurance, il va gravir tous les échelons pour devenir Président National des Syndicats d’Agents Généraux d’Assurance. Cette importante responsabilité lui ouvre les portes du “ WHO’S WHO , pesant recueil qui est le célèbre bottin des personnalités françaises (20.000 personnes environ). Quand on y est, on y est à vie. Cette année, Daniel ORLUC a vu Aimé JACQUET et les 22 joueurs lauréats de la coupe du monde venir le rejoindre dans ce gotha de l’Hexagone. On vous livre un extrait des lignes qui lui sont consacrées :
“ Carrière :Instituteur (1956-62), Fondé de Pouvoir d’Assurances (1963-68), Agent Général d’Assurances à Tulle (depuis 1968), Président de la Chambre Syndicale de Corrèze (1970-82), Président de la région Limousin (1981-87), Membre du bureau exécutif (1982-85), Président adjoint (1985-87), Président (1987-94) de la Fédération Nationale des syndicats d’agents généraux d’assurances (F.N.S.A.G.A), Conseiller national des assurances auprès du Ministre des Finances (depuis 1979), Cofondateur de l’Association pour le développement des technologies d’informatique dans l’assurance libérale (1984), Président de la commission des agents généraux d’assurances du bureau international des producteurs d’assurances (1991-94).
Décorations : Chevalier de la Légion d’Honneur et de l’Ordre National du Mérite.
Sports : navigation à voile, rugby. Membre du Rotary Club de Tulle.
Moralité : Avec une bonne expérience d’instituteur, un séjour de quelques années sur nos terres authentiques (et peut-être aussi un caractère d’exception) on est en droit d’avoir de grandes espérances et de pouvoir les réaliser.