Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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Echos de la grande guerre

Recueillis par Roger Bertold.

   par Roger Berdold



- Les sœurs de Saint-Charles dans la tourmente.
Au moment de la mobilisation et dans les premiers jours de la guerre, l’hôpital de Sainte-Ménehould reçut beaucoup de malades et des soldats victimes d’accidents. L’autorité militaire disposait du service civil ainsi que des dortoirs des orphelins, orphelines et vieillards femmes. Il y eut alors en permanence de cent à cent douze malades ou blessés.
Tous les soldats décédés dans les trains sanitaires de passage étaient transportés à l’hôpital. La chambre mortuaire étant insuffisante pour contenir tous les cadavres, on fut obligé de les laisser dans la cour, sur deux voitures aménagées à cet usage ; les Sœurs devaient se contenter de les recouvrir d’un drap funèbre.
Les orphelins furent hospitalisés dans une maison bourgeoise voisine de l’hôpital et les garçons installés dans un préau qui leur servait de réfectoire et de dortoir. Vers le 15 août, la fièvre typhoïde se déclara parmi les enfants ; vingt-quatre furent atteints. Six sœurs durent également s’aliter, de sorte qu’il n’en restait que trois pour soigner tout le monde.
Sainte-Ménehould connut l’occupation pendant dix jours. Les Allemands apportèrent leurs blessés ; plusieurs se montrèrent assez arrogants, d’autres plus compréhensifs. En tout cas, ce fut une joie de revoir les Français. Puis on reprit le soin de nos soldats, en neuf mois il en passa mille quatre cent trente deux à l’hôpital.
La ville fut plusieurs fois bombardée par un train blindé qui stationnait à une quinzaine de kilomètres. Soixante-seize obus tombèrent, dont quelques-uns assez près de l’hôpital. Nos avions parvinrent à détruire ce train, mais dans la suite ce furent les taubes qui lancèrent des bombes.
Ce danger permanent obligea l’administration à évacuer les vieillards et les enfants. Ces derniers furent conduits à Bois-Sainte-Marie (Saône-et-Loire) et accueillis par les sœurs de Saint-Joseph de Cluny, tandis que les vieillards étaient hospitalisés à l’Asile départemental de Semur-en-Brionnais (Saône-et-Loire) où Sœur Julienne Demange resta avec eux ; six seulement revinrent à, Sainte-Ménehould.
En mars 1918, les bombardements redoublèrent et les Sœurs restèrent presque seules ; enfin, le 6 juillet, l’hôpital ayant été atteint, elles furent évacuées d’office par l’autorité militaire et passèrent quinze jours à Brachay, Haute-Marne, puis le danger conjuré, se hâtèrent de revenir à Sainte-Ménehould.
Quelque temps après, la médaille de la Reconnaissance Française, décernée à la Supérieure avec une citation des plus élogieuse, attestait le dévouement dont les Sœurs avaient fait preuve en toute circonstance.

- Le 5 janvier 1915, un jeune garibaldien, engagé volontaire écrit à sa mère.
Chers Parents,
Me voici enfin un peu d’aplomb, et j’en profite pour vous écrire ces quelques mots.
Voici l’histoire : vous avez dû lire, du reste, sur les journaux du 7, la bataille terrible livrée par nous, le 5 janvier, dans les bois de la Courtechausse, en Argonne, combat qui nous a coûté bien cher, il est vrai, mais que nous avons gagné de haute lutte.
Dans ce combat, sur 138 hommes de ma compagnie, il en reste environ 40. Mon commandant y a trouvé la mort, ainsi que tous les sous-officiers et officiers de la compagnie. Comme je vous l’ai dit, mon secrétaire P a eu la fesse emportée par un éclat d’obus, et moi, voici mon histoire :
Le 4 janvier, à 9 heures du soir, l’on fait appeler les sergents-majors ; nous arrivons tous, et l’on nous dit d’avertir les hommes que nous partirons dans la nuit, à 2 heures du matin, pour livrer un furieux combat dans un bois, à 4 kilomètres de là. Je retourne communiquer cette note à la compagnie. Vous dire l’accueil fait à cette note est incroyable : c’est du délire. Les hommes sont fous de joie et ne cessent de chanter jusqu’au moment du départ. Je donne à chaque homme 240 cartouches et nous partons sous une pluie battante. Nous arrivons près de l’ennemi à 4 heures du matin. L’on nous donne l’ordre de faire coucher les hommes dans la boue, dans un petit ravin, jusqu’à 6 h.1/2, heure à laquelle doit commencer l’attaque.

Aussitôt que les compagnies sont en place, l’on appelle tous les sergents-majors au quartier général. Je m’y rends et là je trouve le général de division et le colonel Garibaldi qui nous dit qu’à un signal convenu, le génie doit faire sauter 800 mètres de tranchées allemandes. Aussitôt les tranchées sautées, nous devons nous porter à la baïonnette sur le restant de l’ennemi. Le signal convenu sont des fusées qui partiront à 6h 1/2. Aussitôt reçu cet ordre, je retourne à ma compagnie, dans un bruit assourdissant de canons de 75. Le spectacle est féerique. Dans tous les bois d’alentour, on ne voit que des flammes : ce sont nos admirables canons de 75 qui ouvrent la danse. L’heure approche : il est 6h 25 ! Les 78 s’arrêtent. Le moment est solennel : 6 h 30 exactement. Voilà les fusées !

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