Appelé aussi frêne élevé, ou frêne commun, on le trouve fréquemment dans les milieux frais et humides, les “ fonds ” de notre forêt argonnaise. Il est le plus souvent disséminé parmi d’autres essences : c’est un solitaire.
Vous le remarquerez facilement à son fût droit, élancé, à l’écorce lisse et gris clair, devenant gris beige et profondément fissurée en vieillissant. Son feuillage léger, au travers duquel la lumière filtre aisément, fait ressembler le ciel à de la dentelle.
Il est également présent dans les bosquets et les haies. Ses cousins, plus sophistiqués, frênes à fleurs, frênes pleureurs, ornent les jardins.
Mais la star de la famille, c’est lui, le frêne commun, tant ses qualités sont grandes et nombreuses ses vertus.
Ses feuilles, diurétiques, dépuratives, anti-rhumatismales, l’on fait surnommer “l’arbre des centenaires . La consommation journalière de “ thé de frêne” (infusion de feuilles sèches : 1 cuillère à dessert dans une tasse d’eau) élimine les toxines du sang et retarde les symptômes de la vieillesse. A noter que pour obtenir du “thé des Alpes , on remplace l’eau par du vin blanc.
Déjà au premier siècle de notre ère, le médecin botaniste grec DIOSCORIDE décrivait le frêne et annonçait : “ses feuilles, pilées en vin, amaigrissent peu à peu ceux qui sont trop gras” .
Quant à ses fruits, graines appelées “ langues d’oiseau ” à cause de leur forme, le même DIOSCORIDE affirme que “leur consommation rend l’homme plus vaillant envers les dames ...”
L’écorce des jeunes rameaux de notre arbre est réputée tonique, fébrifuge et astringente. C’est le quinquina d’Europe.
Pourtant, de nos jours, la chimie a détrôné ces remèdes simples.
Mais outre ses propriétés médicinales et diététiques, le frêne a un autre atout majeur : son bois. Blanc, à reflets nacrés, il est à la fois robuste et élastique, remarquable par sa résistance à la flexion et aux chocs et par sa fibre droite qui ne laisse pas d’écharde.
Déjà, dans les temps très anciens, il servait, entre autre, à la fabrication des arcs et des flèches. On murmure même que c’est grâce à lui si Cupidon ne manquait jamais sa cible ! Très apprécié pour le charronnage, la carrosserie, la menuiserie, il n’a pas son égal pour la confection de manches d’outils, d’échelles, de canes et bâtons de toutes sortes. Il est également utilisé en placage, en ébénisterie. Les racines et les loupes du tronc, appelées “ ébène gris ” sont réservées aux artistes. Excellent bois de chauffage, il est le plus grand rival du chêne. Même s’il n’est pas très sec, il brûle très bien et ses cendres, riches en potasse, constituent un excellent engrais.
Convenez que le frêne n’usurpe pas sa qualification de “feuillu précieux !
Si, au cours d’une longue promenade, vous reconnaissez l’un de ces beaux grands arbres, reposez-vous sans crainte sous son ombre, vous n’y rencontrerez pas de serpents, si l’on en croit le dicton : “Dessous le frêne, venin ne règne, sous le frênes, n’ayez pas peur de dormir” .
Et si vous lui plaisez, peut-être vous contera-t-il la légende nordique de son ancêtre, le grand frêne YGGDRASILL, premier arbre de la création. Il était si haut et sa ramure si puissante qu’il soutenait le ciel. C’est près d’une de ses racines que jaillissait une fontaine, source de tous les fleuves qui irriguent la terre et la rend habitable aux humains. Mais un cataclysme fit périr toute la création, hommes et Dieux compris. Seul, YGGDRASILL résista et c’est dans le bois de son tronc que survécurent un homme et une femme qui deviendront les ancêtres de l’humanité nouvelle.
Qui sait, l’arbre de vie du jardin d’Eden était peut-être un frêne ?
Sources :
L’arbre des centenaires - Bernard Bertrand
Flore forestière française - Institut pour le développement forestier
Mythologie des arbres - Jacques Brosse - Plan