Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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Ma « p’tite Mimi »

   par Roger Berdold



Roger Berdold nous transmet cette étonnante chanson de Théodore Botrel, écrite le 22 octobre 1915 dans une tranchée à La Harazée, près de Vienne le Château.
Vous trouverez ci-dessous le texte, quant à la musique, c’est l’air de « la petite Tonkinoise », chanson coloniale créée par Polin en 1906 (paroles de Christiné, musique de Vincent Scotto) et rendue célèbre par Joséphine Baker.
Théodore Botrel, qui a écrit ( certains diraient commis) le texte, est un ancien employé des chemins de fer qui va connaître son heure de gloire lorsqu’un soir, dans un café chantant, il remplace un chanteur absent et chante au pied levé quelques-unes de ses œuvres dont « La Paimpolaise ». Ce sera la gloire : Mayol mettra cette chanson à son répertoire et lui sera adulé, tant en France qu’au Canada. Il ne manquera pas de détracteurs qui souligneront qu’il est originaire de la seule partie de la Bretagne où l’on ne parle pas Breton, que son œuvre est en Français et qu’il donne du folklore breton de bazar, profitant de la naïveté du public.
Lorsqu’éclate la première guerre mondiale, Théodore Botrel a 46 ans. Ce n’est plus un age pour prendre un fusil, même s’il est engagé tout jeune pour 5 ans afin de faire son service militaire au 4ème de ligne à Rennes. Pourtant il va reprendre du service. Il sera délégué par Millerand, ministre de la guerre (décision du 30 août 1914) pour se rendre dans les cantonnements, casernes, ambulances et hôpitaux pour y dire et chanter aux troupes ses poèmes patriotiques et ranimer le moral des troupes.
Ainsi naît dans les tranchées l’inoubliable « Ma p’tite Mimi » qui fut reprise par Pierre Desproges, qui voyait en elle le summum de la bêtise. A chacun de se faire son opinion sur ce texte ou abondent les allusions grivoises incitant les tirailleurs à transférer les pulsions amoureuses qu’ils avaient vers leur femme ou leur fiancée sur cette arme meurtrière.
On trouve cette chanson sur des C.D. consacrés aux chants de la grande guerre et on peut l’écouter sur internet : http://www.chanson.udenap.org/paroles/ma_mitrailleuse.htm
Il est à noter que Botrel ne manquera pas de courage, puisque, engagé volontaire, chasseur à titre honoraire de première classe au 24ème et 68ème bataillon, il partagera les risques des poilus, risquant sa vie pour leur apporter réconfort. Il sera décoré de la Croix de Guerre (3 citations, une blessure) et de la médaille militaire.

Théodore Botrel est décédé en 1925 à Pont Aven.

I
"A la guerre
On n’peut guère
Trouver où placer son cœur,
Et j’avais du vague à l’âme
De vivre ainsi sans p’tite femme,
Quand, l’aut’ s’maine,
J’eus la veine,
D’être nommé mitrailleur.
Ma Mitrailleuse, ô bonheur !
Devint pour moi l’Ame sœur".

Refrain

"Quand ell’ chante à sa manière :
Taratata, taratata, taratatère
Ah ! que son refrain m’enchante ;
C’est comme un z’oiseau qui chante !
Je l’appell’ la Glorieuse,
Ma p’tite Mimi, ma p’tit’ Mimi, ma Mitrailleuse.
Rosalie me fait les doux yeux,
Mais c’est ell’ que j’aim’ le mieux !"

II
"Plein d’adresse,
Je la graisse,
Je l’astique et la polis,
De sa culasse jolie
A sa p’tit’ gueu-gueul’ chérie ;
Puis, habile,
J’ la défile
Et, tendrement, je lui dis :
"Jusqu’au bout, restons unis
Pour le salut du pays !".

Refrain

 
III
"Quand les Boches
Nous approchent,
Nous commençons le concert :
Après un bon « démarrage »
Nous précipitons l’ « fauchage ».
Comm’ des mouches,
Je vous couche
Tous les soldats du Kaiser,
Le nez dans nos fils de fer
Ou les quatre fers en l’air !"

Refrain
IV
"Mais tout passe
Et tout lasse,
Mêm’ la guerreet, l’un d’ ces jours,
(Ou bien l’un’ de ces années)
Elle sera terminée ;
Alors, vite,
L’on se quitte
Glorieuse, ô mes amours !
Nous devrons, à notre tour,
Nous séparer pour toujours"

Dernier Refrain

"Après un’ salve dernière :
Taratata, taratata, taratatère
En te voyant rendormie,
Je te dirai : "Chère amie,
Fais dodo, ma Glorieuse,
Ma p’tit’ Mimi, ma p’tit’ Mimi, ma Mitrailleuse".
Et des pleurs mouilleront mes yeux
En te faisant mes adieux."
(Tranchée de la Harazée, 22 octobre 1915)

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