Aujourd’hui, les barrières sont toujours là pour assurer la sécurité aux passages à niveaux, quand les voies ferrées croisent les routes et les chemins. Mais de nos jours, ce ne sont que des demi-barrières automatiques, qui, à quelques exceptions près, ne sont plus gardées. Nombre de ces passages à niveaux, devenus trop dangereux à mesure que la circulation routière et la vitesse augmentaient, ont été supprimés, [1] remplacés par des ponts ou autres passages sécurisés. Les autoroutes ne traversent plus les voies ferrées et les TGV ne croisent plus les routes.
Qui se souvient encore des lourdes barrières en fonte qu’il fallait manoeuvrer au passage de chaque train, soit en les montant et les abaissant à l’aide d’une manivelle, soit en les tirant à la force des bras pour les ouvrir et les fermer ? Elles étaient particulièrement dures à bouger quand il gelait ou que la neige les bloquait.
La présence permanente d’agents, les gardes-barrière, était indispensable, ces emplois étant le plus souvent réservés aux épouses des agents de la SNCF.
Ils étaient logés sur place dans des maisons construites toutes sur le même plan : une grande cuisine carrelée tenait tout le rez de chaussée S’y trouvaient l’unique cheminée de la maison, une pompe et sa pierre à eau, un escalier menant à la cave. En haut deux chambres et un grenier, à l’extérieur, une remise.
La barrière Magot
Nombre de ces passages à niveau gardés étaient en pleine nature, loin de tout, comme celui de Cazon [2] , en forêt de Montiers, à deux kilomètres des premières maisons du village du Châtelier. La famille Magot a vécu là depuis le début des années 30 jusqu’à la suppression du gardiennage, vers 1965. Pour tout le monde, c’était« la barrière Magot » !
Jeannine Magot“Olinger, coiffeuse bien connue à Sainte-Ménehould y a vu le jour en 1944. Elle était la sixième d’une fratrie de neuf enfants [3] dont sept sont nés « à la barrière ».
Elle évoque pour « Le Petit Journal » les 18 années passées là.
« Nous habitions au milieu des bois, sur une petite route en terre qui menait au « pays » [4] , Le Châtelier. Notre maison était pareille à celle des autres gardes-barrière, mais vu le nombre d’enfants, elle avait été rallongée : la SNCF avait construit dans la remise deux chambres qui communiquaient avec la cuisine. C’était bien, l’hiver, on y avait moins froid. ! Les chambres du haut n’étaient pas chauffées, on ouvrait les portes pour faire circuler un peu la chaleur
Pas d’électricité, on s’éclairait avec des lampes à pétrole dans la cuisine et des bougies dans les chambres. En dernier, nous avions des lampes à gaz à manchons que nous trouvions peu pratiques, mais aussi des lampes électriques de poche et un poste de radio marchant sur batterie.
Pas de cabinet de toilette non plus, on se lavait dans la cuisine. Pour les WC, une petite cabane près du bois, au bout du jardin faisait l’affaire. On la déménageait quand le « trou » était à saturation !