Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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La page du poète

le laboureur champenois

   par Dominique Delacour



Voici un texte rédigé en vers avec le nom de Hyppolite Hussenet (1836-1916) écrit à la fin. C’est l’arrière-grand-père de Marcel Hussenet de Verrières. Rien ne permet d’assurer qu’il en est l’auteur. En effet il est né et a exercé le métier de paysan à Verrières en Argonne. C’est même totalement exclu dès les deux premiers vers de ce texte.
Comment et pourquoi Hyppolite Hussenet, Argonnais pure souche, a-t-il été en possession de ce document ? Mystère ! Il a été probablement écrit dans la deuxième moitié du 19èsiècle par un habitant de la Champagne dite « pouilleuse », un paysan à première vue. Il est conscient des atouts de sa région alors réputée pauvre, devinant ce qui allait se réaliser quelques décennies plus tard : sa transformation spectaculaire.

 

 

 

 

 


I
Je suis un champenois pur sang
De cœur et de naissance
Si mon pays n’est pas au rang
Des plus riches de France
Il y parviendra
Dès qu’on le voudra
Patience et courage
Champenois allons
D’efforts redoublons
A l’ouvrage, à l’ouvrage

II
Des quatre-vingt-dix-neuf moutons
Si l’on rit j’imagine
Qu’on ne sait pas des vieux dictons
La piquante origine.
Elle fait honneur
A l’esprit frondeur
De nos joyeux grand-pères
Nous qui la savons
Champenois buvons
A ces madrés compères
Buvons champenois
A l’esprit gaulois
De ces madrés compères.

III
A tort jadis on dédaignait
Notre plaine crayeuse
Et sottement on l’appelait
La Champagne pouilleuse.
Loin de s’en fâcher
Mieux il faut tâcher
D’amender la Champagne.
Piochons, labourons
Et nous en ferons
Un pays de cocagne

IV
Le plus souvent que nous pourrons
Appliquons la fumure
Par ce moyen là nous aurons
Une récolte sûre.
Faisons des engrais
Toujours des engrais
Notre sol en demande.
Comblons les marais
Et créons des prés
Nous aurons de la viande.

V
L’eau fait pousser herbe et regain
Sur terre basse et haute
Irriguons et foin, viande et pain
Jamais ne feront faute.
Il s’y connaissait
Sully qui disait
Dans son naïf langage :
Pour la France il est
Deux mamelles, c’est :
Labour et pastourage
Toujours le labourage
Toujours le pastourage.


 

 

 

 

 

 


VI
Le travail ennoblit les gens
Il est notre richesse
Il fait les états tout-puissants
Sans lui le progrès cesse
Si l’on a chez nous
Aisance et gros sous
Si la maison est pleine
C’est qu’aussi nos bras
Ne se croisent pas
Le long de la semaine
C’est qu’on prend de la peine
Car on n’a rien sans peine.

VII
Avec un cheval en tout temps
Je mène ma bertauge
Et fais valoir soixante arpents
Que moi-même je fauche.
J’ai donc peu de frais
Je ne changerais
Pas avec le Vallage
Dont le sol vaut mieux
Que nos champs crayeux
Mais coûte bien davantage
Et donne un rude ouvrage
Sans compter le drainage.

VIII
Mais par un calcul des plus faux
Chez moi c’est une rage
D’acheter champ sur champ nouveau
Quoique mon héritage
Soit grand bien assez
Et qu’un tiers passé
S’y repose en jachère.
Cent fois mieux je ferais
D’y’augmenter ma terre
Forçons les engrais
C’est le vrai progrès
Et guerre à la jachère.

IX
N’abandonnons jamais les champs
Berceau de nos familles.
Restons toujours bons paysans,
N’envions pas les villes.
Le parfait bonheur
Et la paix du cœur
Se trouve au village.
La ville parait
Offrir plus d’attrait
Ce n’est qu’un vain mirage.

X
Nous verrons avant cinquante ans
Si Dieu nous prête vie
Les blés mûrir dans tous nos champs.
Champagne ô ma patrie
Nous t’illustrerons
Nous effacerons
L’épithète railleuse
Terre des élus
Tu ne seras plus
La Champagne pouilleuse.

XI
Champenois buvons à ce jour
Que notre cœur appelle
Buvons au pays notre amour
A son ère nouvelle
Ce vin merveilleux
Ce nectar mousseux
Que produit sa montagne
Qui porte en tous lieux
Son nom glorieux
Vive notre Champagne
Qui porte en tous lieux
Son nom glorieux
Vive notre Champagne.



L’auteur de ces lignes a compris l’essentiel des atouts non exploités et les faiblesses de la Champagne dès cette époque. Il a tout simplement anticipé ce qui s’est réellement réalisé aujourd’hui.
Cela relativise les commentaires, tranchés à l’extrême entendus plus tard, pouvant déformer la vérité. Ces lignes méritent un prochain article pour éclaircir ces points de vue et essayer de cerner au mieux la réalité.
Dominique Delacour

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