Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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Vieux conte argonnais (d’après l’abbé Janel).

Les jolies filles de Florent.

   par Nicole Gérardot



Que faisait-on pendant les longues soirées d’hiver, en attendant Noël, On se réunissait et, devant la cheminée, tout en réalisant quelques menus travaux, on racontait des histoires, des contes, souvent les mêmes, mais qu’importe Florent était réputé pour ses belles filles ; on se souvient de l’histoire du mort-vivant, le cuirassier déclaré mort à tort, pour se moquer des Florentins, un militaire qui allait voir les « belles filles de Florent ».

Ce que je vais vous dire, il y a longtemps que ça s’est passé. Celui qui me l’a raconté, il y a longtemps qu’il n’a plus mal aux dents.
Dans le temps, le château de Florent n’était pas comme aujourd’hui. Il y avait des murs tout autour et des fossés avec des grenouilles. C’était pas les gens du village qui y logeaient, mais le seigneur avec sa femme, ses enfants et le Claude Mayour qui était censément son régisseur.
Dans le moment que je vous raconte, on a décidé qu’on irait se battre contre les Turcs pour leur prendre le pays où le Bon Dieu était venu au monde et où il était mort.
Le seigneur d’ici est parti et le Claude avec lui. Il aurait préféré rester au village. Cela faisait seulement un an qu’il s’était marié avec la Catherine. « Ah ! Tu ne vas pas revenir disait-elle, tu ne vas pas revenir ! Qu’est-ce que je vais devenir ! »
Ils sont partis avec une petite croix sur leurs habits. Ils ne sont arrivés que deux ans après. Ils tombaient comme des mouches. Les Turcs cognaient comme des enragés.
Un jour, le seigneur d’ici, est tombé de son cheval et on n’en a plus eu ni vent ni nouvelles. « Je vais m’en aller de chez ces gens-là » qu’il disait le Claude. Il y avait un Turc qui lui avait envoyé une mornifle qu’il était quasiment éborgné. Le Claude s’était couliné dans une église et s’y était couché. Il y avait un bon moment qu’il était là quand il voit quelqu’un qui entre sans avoir ouvert la porte. « Qui qu’vous êtes ? Vous ne dites rien ? Vous êtes rudement belle ! On voit bien que vous n’êtes pas de chez nous. Vous êtes au moins la bonne Vierge ! Vous venez du paradis ! Si seulement la Catherine était avec moi ! Quand je pense à elle, j’ai mal au cœur. Si j’ai des gamines, j’aimerais bien qu’elle vous ressemble. »
La bonne Vierge a ri. Elle s’est baissée et a cueilli un œillet blanc. « Prenez cet œillet blanc, vous le mettrez chez vous dans la chapelle où les filles viennent à la prière. » Elle lui a répété deux fois que s’il faisait tout ce qu’elle lui avait dit, ses gamines seraient belles comme les beaux œillets blancs, mais qu’elles devraient être courageuses et bien comme il faut pour qu’on ne dise jamais qu’elles étaient belles dehors et laides dedans... Puis la bonne Vierge s’est approchée et lui a touché la plaie qu’il avait dans la figure et il s’est trouvé guéri. Et puis il ne l’a plus vue !
Mais voilà une autre affaire... Il se réveille et devinez où il est ? Il est assis chez lui... Bien sûr que ce sont les anges qui l’ont ramené ! La Catherine n’en revenait pas ! Il avait encore l’œillet blanc dans sa main et il sentait bon !
Plus tard, ses gamines se sont mariées, elles ont eu des filles, et c’est bien vrai qu’elles étaient plus belles que les autres.
C’est bien pour ça qu’on dit toujours : « Les jolies filles de Florent ».
Nicole Gérardot

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