Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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Messire Moineau et dame Moinelle.

   par Nicole Gérardot



En Angleterre, on l’appelle Philip ; en Allemagne, Spatz ; en Espagne, Gorrion ; en Italie, Passero ; aux Pays Bas, Mus et en France on l’appelle Moineau mais aussi , c’est gentil, Pierrot. Mais parfois on l’appelle Piaf ! Quand on est en colère après lui, vous savez quand il s’ébroue dans un rayon de radis que vous venez de semer ou quand il fait grand bruit parce qu’il est en conversation avec d’autres et que vous, vous avez envie de calme.
Messire moineau est un petit oiseau. Il pèse environ 30grammes, un tiers de plus que la mésange charbonnière ! Lorsqu’il se réveille, il fait jour, c’est un lève-tard et un couche-tôt ! Sans même attendre que le soleil soit couché, de nombreux piafs (ils sont parfois une centaine), rassemblés dans un arbre, un gros buisson, une haie épaisse, un vieux lierre grimpant, dorment déjà comme des bébés. Sans oublier la sieste à la mi-journée. Il paraît un vrai privilégié alors que la mésange et le rouge-gorge sont en recherche perpétuelle de nourriture. Son secret, c’est qu’il la trouve facilement. A la campagne, il mange ce qui est destiné aux poules, aux cochons, aux vaches, aux chevaux. En ville, il nettoie les terrasses et les trottoirs sans laisser une seule miette. Son menu préféré, c’est le blé et l’avoine, mais il aime aussi l’orge, le seigle, le riz, le millet... à la ville, bien sûr, il mange des miettes de pain, des restes de gâteaux...
Mais à terre, le moineau ne ramasse pas que des graines. Il avale aussi toutes sortes de cailloux, de grains de sable, de gravillons. Une fois dans le gésier, ces cailloux broient les graines et les carapaces des coléoptères. Et cela en remplacement des molaires que la nature n’a pas mis dans son bec.
Le moineau n’aime pas être seul, il est bien plus en sécurité en bandes. Il est assez casanier et ne s’éloigne guère de l’endroit où il est né. Quand il se déplace, il fonce directement d’un endroit à un autre et doit en permanence battre des ailes. Sa vitesse moyenne est de presque 40 km à l’heure.
Et dame moinelle ? A vrai dire, elle n’est pas très jolie. Son plumage est entièrement brun-beige terne. Le costume de messire moineau n’a rien non plus d’exceptionnel, mais si on le regarde d’un peu plus près, il présente des couleurs variées de brun, roux, châtain, gris, un peu de blanc. Et surtout, quand arrive la période des amours, il a, sous le bec, une splendide bavette noire ! Les moinelles n’y résistent pas. Plus la bavette est grande, plus le mâle est considéré comme sexy !
Vers la fin du mois de janvier, messire Moineau commence à se sentir bizarre. Il va de plus en plus souvent retrouver son vieux nid de l’année précédente. Il chante pour attirer les femelles. Si l’une d’elles se présente, il se met à danser en piaillant et en levant la tête pour montrer sa splendide bavette noire dans l’espoir de faire entrer la demoiselle dans son nid. Si tout se passe bien, la voilà dans le nid. Notre moineau n’a qu’une envie : s’accoupler au plus vite. Mais il doit attendre que sa compagne soit prête. C’est elle qui décide. Enfin un beau matin du mois d’avril, notre moinelle adopte une attitude bizarre. Elle s’allonge. Notre moineau a compris. Les deux tourtereaux vont maintenant multiplier les accouplements à l’infini. (parfois plus d’une dizaine de fois d’affilée). Au total, au cours d’une seule saison, les savants ont pu relever le chiffre extravagant de 320 accouplements en moyenne.
Une fois le couple formé, c’est en principe pour la vie, les moineaux sont en effet considérés comme monogames. La vie de ces petits oiseaux est brève. Bien rares sont les moineaux qui ont la chance de dépasser trois ou quatre ans.
La seule richesse du moineau, c’est son nid. Il y tient comme à la prunelle de ses yeux. Il le réutilise année après année. Il l’a construit dans un arbre, le plus souvent sous un bon toit de tuiles ou à l’intérieur d’un trou de mur. A la naissance le bébé moineau est nu comme un ver et il pèse moins de trois grammes. Il faut donc le tenir au chaud et bien le nourrir. C’est surtout la mère qui les recouvre de son corps, le rôle du père est de nourrir ses petits. À leur naissance les pierrots ne mangent que de tout petits insectes. Comme leur voracité augmente au fil des jours, la mère se met aussi à la recherche de nourriture : chenilles, pucerons, mais aussi fourmis, araignées, mouches. Au fur et à mesure que le temps passe, les parents leur donnent des graines. Quand les jeunes moineaux s’envolent, ils sont devenus aux trois quarts végétariens. Mais les proies animales, riches en protéines sont indispensables à la croissance des oisillons. De la naissance à l’envol des petits, il ne s’est écoulé en général qu’une quinzaine de jours. Déjà, messire Moineau chante de nouveau et fait mille courbettes à sa belle. Et savez-vous ce qu’il fait pour que sa marmaille quitte le nid ? Il ne la nourrit pratiquement plus. (une pratique courante dans la nature).
À mesure que l’été s’avance, de nouveaux petits moineaux viennent rejoindre la bande de leurs grands frères et grandes sœurs. Les parents n’ont pas chômé. En l’espace d’un seul été, ils ont élevé souvent trois nichées.
Le moineau a toujours eu des prédateurs : l’impressionnant faucon pèlerin, les chouettes, le héron, le raton laveur, mais surtout l’épervier d’Europe et le ...chat ! Mais pendant plusieurs milliers d’années, notre moineau domestique a été l’un des petits oiseaux les plus résistants du monde, présent pratiquement partout où l’homme s’est installé. Pourtant, c’est bien lui qui se retrouve sur la liste rouge des espèces menacées.
Déjà en 1919, un Américain réalisa que dans sa ville (Denver) le nombre de pierrots était en train de chuter à un rythme accéléré. En les observant, il s’aperçut qu’ils se nourrissaient de tous les grains d’avoine qu’ils récupéraient dans les crottins des chevaux qui jonchaient les rues. Il y avait aussi la fameuse musette, remplie d’avoine, que l’on suspendait au cou des chevaux, et d’où tombaient quelques grains à chaque secousse. Les moineaux se trouvaient privés de leur nourriture de base. C’était une première alerte.
En 1925, un jeune ornithologue entreprit un recensement complet des oiseux du parc londonien de Kensington Garden. Il a comptabilisé 3982 volatiles appartenant à trente-sept espèces différentes. Les deux tiers étaient des moineaux. En l’an 2000, 75 ans plus tard, dans le même parc, le comptage fut refait. Si le parc abritait 20 espèces de plus qu’en 1925, une espèce avait pratiquement disparu : le moineau domestique. Des recensements comparables, réalisés à la même époque dans d’autres grandes villes donnèrent des résultats similaires. Entre la moitié et 95% des moineaux avaient disparu de ces villes.
À la campagne aussi, plus des deux tiers des pierrots ont disparu.
Dans les années 1960, le travail des champs a été bouleversé par l’arrivée des tracteurs et de toutes sortes d’engins. Au temps des moissonneuses-lieuses tirées par des chevaux, le moineau pouvait s’empiffrer de grains de blé. Il pouvait ensuite se ravitailler dans les chaumes. Les moissonneuses-batteuses, elles, ne laissent pas grand-chose dans les champs. Plus de graines de plantes sauvages, elles sont éliminées par les herbicides. Et puis, autrefois, notre pierrot pouvait aller tranquillement piller le grain dans les granges. Fini tout cela, la moisson est maintenant stockée dans des silos hors de portée des maraudeurs et les cours de ferme sont souvent vides de toute volaille, donc plus de grain à chiper.

Pas trop compliqué donc de comprendre pourquoi le nombre de moineaux a diminué dans les campagnes. Mais en ville ? Trouvent-ils toujours assez de nourriture, de cavités dans les murs ou sous les toits pour faire leur nid et d’insectes pour nourrir leurs petits ? Les champs magnétiques des antennes-relais, la pollution sonore sont-ils en cause ? Le mystère reste entier. On ne peut pourtant pas imaginer que ce petit compagnon depuis la nuit des temps puisse un jour disparaître.
En à peine 15 ans, 30 % des oiseaux ont disparu en France et tout particulièrement les espèces habitant les milieux agricoles : alouettes, perdrix, linottes mélodieuses, chardonnerets, tariers des prés. Les causes sont multiples et les mêmes que pour la disparition des moineaux. Les merles, les mésanges qui fréquentent, entre autres, les plaines cultivées, déclinent aussi. Par contre, les oiseaux qui fréquentent les forêts sont en augmentation.
Le chant des oiseaux est moins varié et moins fort en Europe et en Amérique du Nord selon une étude internationale. Chaque année, la symphonie printanière s’appauvrit, en termes de complexité et de variété et suit le déclin des populations.

Que faire pour aider les oiseaux ?
Les nourrir pendant la période de froid et leur donner à boire en cas de forte gelée.
Planter des plantes mellifères, des espèces champêtres dans son jardin. Laisser quelques carrés d’herbes folles. Ne pas tailler les haies au-delà du mois d’avril. Adhérer à une association qui les protège au quotidien comme la L.P.O. (ligue protectrice des oiseaux)
Nicole Gérardot

Sources : La Hulotte, le journal le plus lu dans les terriers

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