Antoine Laurent LAVOISIER est connu pour ses travaux en chimie. Il fut le premier à faire l’analyse de l’air, à identifier l’oxygène et l’azote et à donner la composition du gaz carbonique. En plein siècle des lumières, ce chercheur travaille sur la méthode de nomenclature chimique et publie en 1789 le traité élémentaire de chimie.
Pourtant rien ne semblait prédisposer LAVOISIER à embrasser une carrière de savant. Il suit des études de droit à la faculté, avant d’entamer, en 1764, une carrière au Barreau de Paris.
Ce n’est pourtant ni le chimiste, ni l’avocat, qui visitera Sainte-Ménehould le 22 septembre 1769. En effet, Antoine Laurent LAVOISIER est à l’époque inspecteur régional de la Ferme, sous les ordres du directeur de la commission du tabac, Jacques PAULZE. LAVOISIER entre dans la Ferme générale en qualité d’adjoint du vieux fermier général François BAUDON. La compagnie des fermiers généraux était une société privée de soixante membres. Tous les six ans, elle négociait un bail (d’où le nom de fermier) avec le Trésor Royal. La Ferme percevait les taxes, notamment la gabelle et les douanes intérieures.
L’ancêtre de notre fisc était impopulaire. C’est donc en tant qu’inspecteur des impôts que LAVOISIER rend un rapport à Jacques PAULZE où il soupçonne le responsable du magasin des tabacs de dissimuler une partie des ventes.
Il prévoit même une visite surprise à la fin du mois de septembre, pour découvrir le pot aux roses. Non content de vérifier la bonne marche du commerce du tabac, il propose de surprendre les officiers du grenier à sel qui semblent avoir oublié leurs devoirs. On n’a pas trace d’un courrier exposant les conclusions de l’inspecteur LAVOISIER. Ses rumeurs étaient-elles infondées ?
On garde à Sainte-Ménehould l’emplacement du grenier à sel, construit entre la rue Gaillot Aubert et le bras de l’Aisne. Où pouvait être situé l’entrepôt des tabacs ?
CORRESPONDANCE DE LAVOISIER
N°99
LAVOISIER A PAULZE
22 septembre 1769
(Archives de Chabrol, O.)
Timbre de la poste : Châlons
De la main d’un secrétaire. Signature seule de Lavoisier
à Monsieur PAULZE,
fermier général du Roy à l’Hôtel des fermes à Paris
Châlons S.M. le 22 septembre
1769
Une de mes occupations, Monsieur, en passant il y a six semaines à Sainte-Ménehould, a été de me transporter à l’entrepôt pour examiner l’état des tabacs. Le magasin est situé au rez-de-chaussée dans une petite chambre qui a été construite exprès dans la cour. Ce magasin m’a paru très sec et les tabacs en très bon état. Je suis persuadé, même, qu’ils doivent en éprouver quelque déchet. J’étois fort tranquille après cela sur l’état de cet entrepôt lorsque j’ai appris il y a quelques jours qu’indépendamment de ce magasin, l’entreposeur avoit un petit caveau dans lequel il faisoit passer alternativement les tabacs qu’il livroit au public. Comme je n’ai confié à personne le projet que j’ai d’aller à Sainte-Ménehould à la fin du mois, j’espère que je serai en état d’éclaircir le fait. Et je vous en rendrai compte. Je ferai en même temps en sorte d’arriver à Sainte-Ménehould un jour de distribution du Sel, afin de voir si les officiers du grenier assistent aux ventes et de rétablir le bon ordre dont on paroit s’être écarté dans ce grenier.
J’ai l’honneur d’être avec un très sincère attachement
Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur
LAVOISIER
En 1793, la Convention décide l’arrestation de tous les fermiers généraux. LAVOISIER se constitue prisonnier. Il est envoyé devant le Tribunal Révolutionnaire. Il est condamné à mort et guillotiné le 8 mai 1794.
Source : Académie des Sciences Archives et Patrimoine historique, 23 quai de Conti, 75006 PARIS