Dans notre dernier numéro nous évoquions le ô combien célèbre château de Boncourt lié à la famille de Chamisso qui n’est aujourd’hui que traces peu perceptibles sur un sol agricole.
Aujourd’hui, nous voulons vous faire découvrir un descendant, pourrait-on dire, de ce château : le château de Vaux. Découvrir, car cette imposante et harmonieuse gentilhommière est des plus discrètes. Pour l’apercevoir, il suffit de quitter la route de Chaudefontaine en haut de la côte, une petite route à droite y mène. Mais c’est une impasse et les actuels propriétaires, deux frères jumeaux Mariano et Natale RICHIUSA veillent à leur tranquillité et il n’est pas possible d’entrer dans la propriété. De bons rapports de voisinage me permettent d’y accéder aisément.
Alcide Leriche qui fut mon professeur (collège de Clermont 1955) a fait un excellent travail au milieu des années 1970 pour recenser toutes les richesses du patrimoine argonnais. Ainsi dans « Chevauchées en Pays d’Argonne », quatre pages sont consacrées au château de Vaux. Malheureusement, une documentation hâtive et superficielle l’a amené à se fourvoyer. Avec l’aide de Monsieur Geoffroy de Chamisso, j’ai pu retrouver quelques traces de l’histoire de l’édifice.
Le premier château de Vaux.
Il semble qu’il s’écrivait Vaux, mais de toute façon, c’était bien le pluriel de Val. Evitez, s’il vous plait d’écrire « Veaux »). La carte de Cassini (1750) le localise très précisément en bas de la pente, côté Bignipont. En fait, c’était une modeste ferme dépendant de la petite seigneurie de Bignipont. A côté de la ferme était bâtie la maison des maîtres, elle aussi fort modeste, qui, après la révolution, va passer de mains en mains. En 1880, Henri de Chamisso acquiert la propriété et en 1884, il va faire démolir ce château. Subsiste de cette époque un petit plan d’eau et les restes des caves qui en 1960 étaient encore en état puisque les fils du propriétaire y organisaient des « surprises parties ».
Les De Chamisso et la nostalgie du château de Boncourt.
Henri de Chamisso, le nouveau propriétaire est en parenté avec Aldebert von Chamisso dont la renommée littéraire est au zénith.
Vers 1700, les de Chamisso, seigneurs de Sivry vont donner naissance à deux branches, les seigneurs de Villers dont Henri est issu et les seigneurs de Boncourt dont Adalbert est le plus connu. Plus précisément, le père d’Henri est le cousin issu de germain d’Aldebert. De son prénom Louis, il est sous lieutenant en 1870 et encadre les mobiles de Vitry qui sont pris dans la tourmente à Passavant. Emmené en captivité, il bénéficia, peut-être grâce à la notoriété de son cousin, d’un régime de faveur : il fut autorisé à séjourner à Spandau chez le fils d’Aldebert, lieutenant-colonel dans l’armée prussienne.
Voilà des liens étroits et Henri va se faire un devoir de perpétuer la mémoire de cette branche émigrée en Allemagne et auréolée d’un romantisme nostalgique qui se cristallise dans le poème « Das schloss ». Pour ce faire, le nouveau seigneur de Vaux décide en 1886 d’entreprendre la construction d’un nouveau château.
Le château d’Henri de Chamisso.
C’est une bâtisse quadrangulaire sans aile, à l’architecture légère avec balcons, décrochements bien dans l’air du temps. Situé en haut de la colline, dans un parc ombragé par des arbres centenaires, elle bénéficie d’une magnifique vue sur la vallée de l’Aisne et sur Chaudefontaine. Initialement, des jardins en terrasse descendaient vers le village.