Du jeudi 23 juin 1791 “ N°707
---------Il paroît certain que le Roi et la famille royale sont maintenant à Châlons. On est donc hors de danger ; on craignoit un coup de main de la part du traître BOUILLE. On assure qu’il l’a tenté, mais qu’il a été vigoureusement repoussé. (C’est par erreur qu’on a dit hier qu’il avoit été arrêté ; c’est un simple dragon qui l’a été.) N’avoit-on pas raison de se défier de ce BOUILLE ?
Du samedi 25 juin 1791 “ N°686
---------Suite de la séance du jeudi au vendredi 24 juin, on a lu une lettre des trois commissaires envoyés auprès du Roi, qui mandent que partout, sur leur passage, ils ont vu les gardes nationales et les corps administratifs prêts à mourir pour la liberté et pour conserver le bon ordre.
---------A cette lettre a succédé la lecture d’une foule d’adresses, et, entre autres, de celles des corps administratifs de Sens, de Seine-et-Marne, de Somme, de la garnison et des corps administratifs de Valenciennes.
---------« L’assemblée nationale décrète traîtres à la nation et au Roi ceux qui auront conseillé, aidé et exécuté l’enlèvement du Roi et tous ceux qui, pour favoriser leurs desseins pervers, aussi contraires aux droits imprescriptibles du peuple François, qu’à l’intérêt de la royauté, tenteroient à mettre obstacle au retour du Roi dans la capitale et à sa réunion aux représentants de la nation.
---------Ordonne à tous fonctionnaires civils et à tout commandant de troupes de ligne, de gendarmerie nationale et de gardes nationales, d’employer, l’autorité qui leur est confiée, pour maintenir en pleine sûreté la personne du Roi et celle des individus de sa famille dont elle est environnée.
---------Ordonne également de repousser par la force, de saisir et de mettre en état d’arrestation, pour être immédiatement livrés à la poursuite des tribunaux, tous ceux qui oseroient manquer, envers le Roi, au respect dû à la dignité royale, ou violer, dans les personnes qui l’accompagnent, la sûreté individuelle garantie à tous les citoyens par la constitution, etc
---------N.B. A six heures, ce matin, un courrier dépêché par le département de Seine-et-Marne, a annoncé que le Roi a couché cette nuit à Epernay, à vingt-huit lieues de Paris ; MM. BARNAVE, DELATOUR et PETION l’avoient joint.
---------M. ROMEUF, aide de camp de M. LA FAYETTE, qui avoit été à la poursuite du Roi, a rendu compte de son voyage. Il a dit que quand il avoit notifié au Roi le décret de l’assemblée nationale, celui-ci lui avoit juré sur sa parole (parole de Roi) qu’il, n’avoit pas intention de sortir de France, mais seulement d’aller à Montmédy.
---------Une députation du district de Clermont a donné de nouveaux détails sur l’arrestation du Roi.
---------M. DAMAS a entrepris de protéger sa fuite par ordre de BOUILLE, mais, abandonné par ses dragons, il s’est vu forcé de fuir lui-même. Le Roi avoit un passe-port signé MONTMORIN et donna sous le nom d’une prétendue baronne de KORFF, allant à Francfort avec un valet de chambre, trois domestiques, une femme et deux enfants. Pour avoir raison de ce passe-port, M. MONTMORIN a été mandé à la barre. Il s’est disculpé, en disant qu’on le lui avoit surpris. On a nommé quatre commissaires pour vérifier ce fait.
Du dimanche 26 juin 1791 “ N°687
---------On a commencé par la lecture d’une dépêche arrivée le matin de Verdun. Elle annonce l’arrestation de quatre officiers qui commandaient les détachements envoyés pour protéger par la force l’évasion du Roi. Ces officiers sont M. CHOISEUL, M. DAMAS, M. REMI et M. FLORIAC.
---------On a lu ensuite une lettre des trois commissaires expédiés auprès du Roi, datée de Dormans, 24 juin, à trois heures du matin et dans laquelle ils disaient que le Roi a couché cette nuit à Dormans.
---------L’objet qui a forcé principalement, ensuite, l’attention de l’assemblée, est le projet de décret présenté par M. THOURET, relativement au traitement du Roi.
---------Il a proposé de décréter :
1 “ Que le Roi, de retour au château des Tuileries, aura provisoirement une garde soumise aux ordres directs du commandant général, qui sera responsable de sa conduite.
2 “ Qu’il sera également donné provisoirement à l’héritier présomptif une garde sous les ordres du commandant général et un gouvernement qui sera nommé par l’assemblée nationale.
3 “ Que tous ceux qui ont accompagné la famille royale seront mis en état d’arrestation et interrogés, et que le Roi et la Reine seront entendus dans leur déclaration, pour être pris ensuite telle mesure qui sera jugée convenable.
4 “ Qu’il sera également donné provisoirement une garde à la Reine.
5 “ Que jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné, le ministre de la justice sera autorisé, comme il l’a fait, depuis l’évasion du Roi, à apposer le sceau de l’état sur les actes émanés du corps législatif.
6 “ les ministres et les commissaires du Roi seront autorisés à exercer, sous leur responsabilité, les fonctions du pouvoir exécutif.