---------Nicolas-Eloi LEMAIRE, né à Triaucourt, le 2 décembre 1767, était le fils de modestes laboureurs. Habitué aux travaux des champs, aîné d’une nombreuse famille, il était appelé à suivre la profession paternelle, mais sa vive intelligence ayant été remarquée, on conseilla à son père de lui faire continuer ses études. LEMAIRE passa successivement dans les collèges de Sainte-Ménehould, de Sainte-Barbe et dans celui du Plessis, à Paris. Ses rapides progrès lui valurent le bénéfice de la pension gratuite et, en 1787, il remporta le prix d’honneur au concours général de l’Université.
---------Lorsqu’il revint en vacances, il fut reçu et fêté par la municipalité de Sainte-Ménehould. Un accueil plus chaleureux encore l’attendait dans son village et, le lendemain, on le conduisait de la maison paternelle à l’Hôtel de Ville, où il fut complimenté dans des termes élogieux. Déjà, dans l’esprit du peuple, les qualités de l’intelligence l’emportaient sur les privilèges de la naissance.
---------Puis, LEMAIRE, agrégé de l’Université, obtint la chaire de rhétorique au collège du Cardinal Lemoine. En 1793, pour acquérir un certificat de civisme, il tint tête à Hanriot, commandant de Paris. Son énergie lui valut d’être nommé président de la Section des Sans-Culottes et, en cette qualité, il contribua à sauver nombre de personnes, professeurs, savants, habitants de la Meuse. Comme juge suppléant au tribunal civil, il s’attira des haines qui faillirent le perdre, lui et sa femme. Il fut promu juge au même tribunal en 1795. Sa fermeté et son activité attirèrent alors sur lui l’attention du Gouvernement : il fut proposé pour le Ministère de l’Intérieur. Le 18 brumaire changea la face des affaires. Les regrets que LEMAIRE avait exprimés au sujet du Coup d’Etat le mirent en suspicion. Il s’exila quelque temps dans le Piémont, réuni à la France depuis 1803. Il aida le général Menou dans l’organisation administrative de ce pays. C’est pendant son séjour en Italie, qu’il eut l’idée de publier les Classiques latins. Il revint à Paris en 1803.
---------Elu au Conseil Général de la Meuse, il en devint le Président. Après quatre années consécutives, il se retira, non sans garder l’estime de ses collègues.
---------De retour dans la capitale, il vécut dans la société des hommes célèbres avec lesquels ses études, ses fonctions et ses voyages l’avaient mis en rapport. Il suppléa quelque temps Delille dans la chaire de poésie latine au Collège de France et s’y fit remarquer par son esprit brillant. 1810, le 25 décembre de la même année, il fut nommé professeur à la Faculté des Lettres de Paris. En 1812, LEMAIRE fut cruellement frappé par la perte de son fils unique. S’éloignant du monde, il se renferma dans le silence des travaux littéraires. Le professeur fut moins brillant, mais le savant gagna en maturité.
---------A la première Restauration, considéré comme suspect, il revint dans la Meuse, où il fut encore une fois nommé président du Conseil Général. Il songea à la députation. Mais, ennemi des intrigues auxquelles il aurait pu être mêlé, il changea d’idée et consacra tout son temps à son œuvre capitale, l’édition des Classiques latins - 1811. Il dirigea cette entreprise avec une infatigable ardeur, s’assurant le concours de collaborateurs distingués, traitant avec les imprimeurs et donnant au travail une puissante impulsion. Après quinze ans d’un travail opiniâtre, il touchait au terme de ses efforts quand il fut emporté par une épidémie de choléra, le 3 octobre 1832. Son neveu, Pierre-Auguste LEMAIRE se chargea de mettre la dernière main à son oeuvre.