---------Personne n’a jamais trouvé de recette de « la galette aux fayots ». Il s’agissait d’une farce colportée au détriment des Chaudefontainois, gens simples, pauvres, qui étaient souvent la risée de ceux de la ville. On les surnommait les bots (crapauds), les baraqueux, les quoat’vanntes, allusions désobligeantes à leur taille, leurs maisons, leur appétit. La tradition, ou plutôt la malignité des voisins, rapporte le trait suivant :
---------« Echevins et syndic de Chaudefontaine se trouvaient à un festin officiel à Sainte-Ménehould et, désolés d’avoir puisé trop abondamment aux premiers mets, s’écriaient en voyant arriver le plat suivant : « Si sauma j’avii quoat’vann’tes » (si seulement j’avais quatre ventres) »
---------L’Abbé LALLEMENT, Contes rustiques et folklore de l’Argonne - 1913
---------Pourtant, quand j’étais Maire de Chaudefontaine, j’ai reçu un jour dans mon courrier la recette de la galette aux haricots de Chaudefontaine, envoyée par notre illustre concitoyen Yvan DESINGLY, dont chacun connaît le génie inventif qui va du pédalevoile au Pied d’or. Je vous la livre :
---------Pour 4 ou 5 personnes :
1 fond de tarte (1kg de farine, 1 livre de saindoux, 2 œufs, une pincée de sel), une purée de haricots de Chaudefontaine, quelques petits lardons frais (lard du saloir). Passer un quart d’heure à vingt minutes au four.
---------Pressé de questions, l’Yvan avoua qu’il s’agissait là d’une recette qu’il avait imaginée en s’inspirant de la « flambée », une galette que l’on faisait cuire en même temps que le pain. Mais la garniture n’était faite que de chaillons crus (lard gras et lard maigre désalé).
---------Il se souvenait que l’Albert RAULET, né en 1896 à Chaudefontaine, d’un père commis de culture chez OBELIANNE à la ferme du prieuré, cuisait ses galettes en même temps que le pain, dans le four de la Charité (pensionnat de Sainte-Ménehould, aujourd’hui école Saint Charles), où , paraît-il, il existe encore et est en bon état. Une fournée par jour et parfois un peu de pâtisserie. Rien que pour les sœurs et les élèves : un boulanger particulier. Le lait était apporté par le père de Madame CHEMERY, Monsieur LECAILLON. La farine venait du moulin de Chaudefontaine exploité par Monsieur CORBILLON, ancien capitaine du 132ème d’Infanterie à Reims. On apportait son blé et il rendait la farine. Il livrait les boulangers jusqu’à Cernay-en-Dormois, cinquante quintaux par voyage. Paul DUBOISY, mon grand’père, résidant lui aussi cour du prieuré, était « chasse collet » au moulin. A six heures du matin, il partait livrer, conduisant un chariot bâché attelé à cinq chevaux ardennais. C’était un costaud. Il portait un sac de cent kilos sous chaque bras. On raconte qu’il participait parfois aux combats dans les baraques de lutteurs.
---------A cette époque, le pain ne vous tombait pas tout cuit dans la bouche !
F. DUBOISY