Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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PERSONNAGES CELEBRES

UN HEROS ARGONNAIS, LE GENERAL MAYRAN



---------Le général MAYRAN n’est pas un enfant de l’Argonne, mais il a adopté cette région par son mariage avec Mademoiselle de CHAMISSO. Il s’y est installé en achetant la propriété du bois d’Epense, dans un des sites les plus agrestes de la rustique vallée de la Biesme. Son tempérament d’artiste l’avait attiré vers un endroit dont il aimait tant la beauté des sites. Et puis sa dépouille mortelle repose en plein pays argonnais. Son fils, enfin, le colonel MAYRAN, habite toujours le bois d’Epense. Toutes ces raisons nous paraissent de suffisante valeur pour que nous puissions qualifier le général MAYRAN de soldat de l’Argonne.
---------Joseph-Décius-Nicolas MAYRAN, vit le jour à Saint Domingue, le 19 janvier 1802. Son père, qui commandait l’artillerie de l’île mourut le 13 février 1802, en luttant conte l’insurgé Toussaint-Louverture. Madame MAYRAN, devenue veuve, retourna en France afin de mettre ses deux fils sous la protection du gouvernement. Après bien des démarches, le Prytanée de La Flèche est ouvert à ses enfants. Décius avait alors 7 ans. A partir de ce jour, sa vie devient publique. Elle est réglée par le tambour, au son duquel il doit tomber pour mourir. Examinons successivement ses états de service.
---------Il sort de Saint-Cyr en 1821, avec le grade de sous-lieutenant. Il prit part, en 1823 et en 1824, aux campagnes d’Espagne, comme garde de 3ème classe. Le licenciement de la maison militaire du roi Charles X le replaça dans les rangs de simple citoyen. Ce repos ne lui plaît pas et il finit par être rendu à l’armée. En 1831 et 1832, sa bravoure et son activité en Belgique lui valent le grade de capitaine.
---------Nommé adjudant-major au 1er bataillon de la légion étrangère le 27 avril 1836, il y devint un officier infatigable, plein d’expérience et de courage. Au siège de Constantinople, MAYRAN est cité au rapport pour sa conduite, payée par un coup de feu au bras droit, désormais paralysé. Le 11 novembre 1837, le gouvernement lui confère la croix de chevalier de la Légion d’honneur. Chef de bataillon au 61e de ligne, le 21 juin 1840, il fut appelé, le 30 mai 1841, au commandement du 1er bataillon de chasseurs à pieds, après son retour en France. MAYRAN, chef de corps, révèle alors toutes les facultés d’un esprit profondément organisateur.
---------Successivement lieutenant-colonel du 60e et du 5e de ligne, il fit les campagnes de 1845, 1846 et 1847 en Afrique. C’est alors que le général de Caroudelet écrit de lui : « MAYRAN, qui n’était encore que lieutenant-colonel, a exercé le commandement supérieur du cercle de Tlemcen de telle façon qu’on peut dire que son administration, probe et loyale autant que ferme et éclairée, n’est pas le moins glorieux de ses titres à la reconnaissance de la France ».
---------Colonel du 58e de ligne, le 22 avril 1847, il obtint la croix d’officier de la Légion d’honneur, le 7 juin 1850. Nommé général de brigade le 22 décembre 1851, il commande successivement les subdivisions militaires du Vaucluse et de la Meuse. C’est vers cette époque, le 18 mai 1852, qu’il épouse Mademoiselle Camille de CHASSIMO.
---------En 1854, MAYRAN est nommé spontanément au commandement du corps d’occupation de la Grèce, où son caractère ferme et bienveillant atteignit complètement le but qu’on se proposait. Le 9 août 1854, le général est élevé au rang de commandeur de la Légion d’honneur. En octobre, il est à Constantinople, puis en Crimée, où sa brigade devient la 1ère de la 6e division. Il touche au faîte de sa carrière : général de division le 10 janvier 1855, il succède au prince Napoléon dans le commandement de la 3e division de l’armée d’Orient. La Tauride voit se renouveler d’une et d’autre part les sacrifices d’hécatombes humaines. MAYRAN doit aussi périr ! Au combat du 7 juin, il ordonne une brillante charge à la baïonnette et, à la tête de sa division, il s’empare des ouvrages blancs du carênage. Mais dix jours après, le 18 juin, dans l’attaque contre la tour Malakoff, le général reçoit une blessure fatale : il tombe, frappé au dessus du cœur par un biscaïen de grappe marine. Il avait deux côtes cassées et le poumon gauche enfoncé. Il veut mourir au milieu de sa division. On l’emporte malgré lui et il expire le 22 juin 1855, après quatre jours d’horribles souffrances. Suivant ses dernières volontés, son cœur fut reporté en France, à sa famille, dans le château du bois d’Epense.
---------MAYRAN meurt âgé seulement de 53 ans. Son souvenir a mérité d’être gravé dans les Annales militaires d’une généreuse nation. Ses actes furent des exemples et dans les relations privées et dans les hasards de la vie guerrière. A l’énergie du soldat, il alliait le sens moral du philosophe pratique, à la bonté du camarade ou du supérieur, la délicatesse de l’artiste.

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