Lors d’une réunion organisée par l’association qui porte le projet de Parc Naturel, un intervenant a quelque peu rompu le consensus qui s’établissait. Il voyait dans l’attachement que portent les habitants à leur statut d’Argonnais de préférence à toute autre (Marnais, Ardennais ou Meusiens) un atout pour notre « pays ». Et, disait-il, si ce trop plein d’amour pour ses racines nous donnait une image vieillotte et nous empêchait d’appréhender l’avenir avec modernité ? Ces propos étaient tenus, non pas par un technocrate venu d’ailleurs, mais par un acteur apprécié de l’animation touristique et culturelle de « chez nous », qui œuvre efficacement pour promouvoir l’Argonne.
J’ai cru comprendre qu’à force de valoriser les fondamentaux, l’histoire, la nature, la gastronomie, nous donnons une image trop passéiste de notre territoire.
Cela me rappelait la vision de la France qu’avaient les Acadiens que je rencontrai lors d’un échange scolaire. Pour eux, comme souvent à l’étranger, la France c’est Paris et ses monuments, ses paysages et ses sites remarquables, la gastronomie, le commerce de luxe.... Lors d’une conférence que je donnai à Cap Pelé (Nouveau Brunswick), je soulignai nos secteurs de pointe (automobile, TGV, Ariane, Agroalimentaire...) ce qui étonna les auditeurs. Là aussi, le passé était prédominant.
Trop d’Argonne nuirait au développement d’une entité, trop repliée sur elle-même ? Qu’en pensez-vous ?
Quand nous évoquons l’Argonne, regardons nous suffisamment vers l’avenir ? Soulignons-nous assez nos atouts économiques (Réalméca, Alcan, filière bois...) et le potentiel d’une situation géographique trait d’union entre la Champagne et la Lorraine avec deux dessertes autoroutières et peut-être demain des liaisons ferroviaires de qualité vers Reims et Metz ?
Quant à moi je pense qu’il ne faut pas opposer passé, traditions et modernité. La préservation des patrimoines est un levier économique qui doit faire émerger des microprojets artisanaux et touristiques originaux. Elle n’entrave en rien un développement économique responsable et solidaire. Notre forte identité doit devenir un facteur attractif qui nous mène vers un avenir riche et novateur.
Il faut y croire ou périr.