Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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Les usages locaux :

la vaine pâture, le râtelage, le glanage.

   par Patrick Desingly



Par définition, à l’origine, la vaine pâture est un droit d’usage qui permet de faire paître gratuitement son bétail en dehors de ses terres, sur les bords des chemins, sur les friches, sur les terres nues, sur les prairies naturelles après la récolte de la moisson ou du foin.
A noter que le « droit de parcours » est le même droit mais attribué aux habitants de deux communes (souvent en raison d’un point d’eau en commun).
A l’époque féodale, le propriétaire d’un terrain perdait systématiquement l’usage de son terrain dès la dernière gerbe enlevée (impôts), ainsi que sur ses terrains mis en jachère pendant une certaine période, suivant la bonne volonté du Prince.
Pendant cette époque, on a pu constater un fort développement de l’usage de la glandée. Cette manière de faire a permis longtemps au plus pauvre de la communauté d’entretenir du bétail (avec un maximum de deux bêtes) pour permettre de survivre sans être propriétaire. Bien évidemment, au XVIIIème siècle, ce droit a été contesté par les Seigneurs locaux actant le fait que ce droit était un obstacle à la clôture de leurs propriétés. En 1761, le roi cède à leurs exigences et provoquera de ce fait de nombreux conflits et beaucoup de misère.
N’a-t-on pas retrouvé à répétition ces griefs dans les cahiers de doléances en 1789, demandant le rétablissement de cette coutume ?
Au XIXème siècle, la vaine pâture a fait l’objet d’un nouveau débat et d’une réglementation restrictive car considérée comme un frein alors au progrès agricole. La loi du 22 juin 1890 supprime ce droit sauf si son maintien est fondé sur une ancienne coutume ou sur un titre.
Un homme politique, châlonnais de par son mariage, Léon Bourgeois, socialiste libéral, monte au créneau et défend la solidarité comme une doctrine au bien des peuples. Pour lui, l’individu n’existe pas. Les hommes sont interdépendants et ont tous une dette envers la société qui leur a permis de s’épanouir mais, puisqu’ils ne disposent pas du même avantage, cette dette ne peut être la même pour tous. Aujourd’hui, le droit de vaine pâture, comme celui du ratelage (action de ramasser avec un râteau) ou le glanage sont tombés en désuétude.
Néanmoins, ces droits sont toujours d’actualité pour certaines communes sous réserve d’avoir, pour les conseils municipaux, délibéré pour leur maintien avant le 09 juillet 1890.
Certes, des restrictions ont été apportées car le troupeau, souvent des moutons, ne pouvait parcourir les terres sans que le propriétaire puisse s’y opposer sous réserve qu’il mette à disposition ses terres sans la volonté de les clôturer à l’avance et que son troupeau soit proportionnel à la superficie de ses terres. A noter que cette pratique de la vaine pâture a choqué l’agronome anglais Arthur Young lors de sa visite en France en 1789.
En Belgique, aujourd’hui, le glanage est autorisé uniquement en journée pour les vieillards, les infirmes, les femmes et le jeunes de moins de 12 ans à condition que les champs soient non clos et seulement dans leur commune de résidence.
La suppression de la vaine pâture sur les prés souleva dans toute la France des vives protestations, de nombreux procès puisqu’elle portait atteinte à un droit immémorial exercé par les moins fortunés.
A noter que dans le département de la Marne, de nombreuses communes demandèrent le maintien de la vaine pâture sur les terres mais très peu sur les prés. D’autres omirent volontairement ou involontairement de prendre la délibération présentée par la loi et laissèrent donc le droit s’éteindre. Dans notre Argonne, seule la commune de Voilemont a supprimé la vaine pâture sur les terres et les prés dès août 1890.
Aujourd’hui, en temps de crise, de difficultés économiques, le glanage pour sa propre consommation des champs de pommes de terre après récolte ne serait-il pas un moyen de mieux vivre pour une partie de nos concitoyens ? La solidarité n’est-elle pas le ciment des sociétés ?

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