Connaissance du Patrimoine Culturel Local
Le Petit Journal
de Sainte-Ménehould
et ses voisins d'Argonne
Edition régulière d'un bulletin traitant de l'histoire, des coutumes et de l'actualité.


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Les forêts communales en Argonne.

   par Eric Chevalier



Carte forestière de l’Argonne :
En marron les forêts communales dont il est question dans cet article.
En vert clair les forêts privées, en vert foncé les forêts domaniales.


Eric Chevallier, de la Grange aux Bois, nous propose un article sur les forêts communales en Argonne. Retour sur l’histoire qui anime une répartition des forêts communales parfois pas très logique. Découverte

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Avant la Révolution, la forêt d’Argonne était essentiellement abbatiale. Du nord au sud, les dons successifs des seigneurs aux abbayes locales ont fait de ces dernières de gros propriétaires forestiers qui la géraient et en faisait profiter la population locale par un ensemble de règlements propres au système économique de l’époque, dans le respect de la pérennité de la forêt.
Après la Révolution, ces forêts ont été confisquées et sont devenues des « biens nationaux ». La mise en place de l’administration forestière fut longue et chaotique, si bien que ces forêts, mal surveillées et mal gérées, furent l’objet de pillages anarchiques de la part de la population qui avait besoin de bois, mais aussi besoin de faire paître ses animaux.

Quand les choses se sont clarifiées, certaines de ces forêts ont été « aliénées », terme de l’époque qui signifiait « vendues pour renflouer les caisses de l’Etat ». D’autres sont restées domaniales et gérées par l’administration forestière balbutiante. D’autres, enfin, ont été données aux communes qui n’avaient pas de forêt suite aux demandes incessantes des habitants pour prélever du bois dans les forêts domaniales.
En étudiant une carte de l’Argonne, on peut constater que dans la vallée de l’Aire, toutes les communes ont leur forêt sur la façade est du massif : Lavoye, Rarécourt, Froidos, Aubréville, Clermont, Neuvilly, Boureuilles, Varennes. Au sud, Waly, Beaulieu, et dans une moindre mesure Passavant, ont chacune un bout de forêt communale.
Côté vallée de l’Aisne, Sainte-Ménehould, Chaudefontaine, Vienne-la-Ville, Vienne-le Château, Binarville, ont leur forêt. Moiremont, Florent, La Neuville-au-Pont, tout comme Valmy, Maffrécourt et Braux-Sainte-Cohière possèdent deux forêts indivises.
Curieusement, Verrières, Villers et Châtrices n’ont pas de forêt. Géographiquement, on peut penser qu’elles méritaient chacune une partie de la Fontaine d’Olive ou de la Haie-Guérin. Une mémoire locale a peut-être l’explication à ce manquement.
Qu’en est-il des villages de la vallée de la Biesme ? Ils n’ont rien. Les forêts domaniales de Beaulieu et Châtrices viennent contre les pâtures de Futeau. Les forêts domaniales de Grand Pays, La Controlerie, les communales de Sainte-Ménehould et Valmy enserrent Les Islettes. Plus au nord, les domaniales de Lachalade et des Hauts Bâtis font de même avec Le Neufour, Le Claon, Lachalade.

Une personne de Futeau m’a dit un jour, comme elle avait dû l’entendre maintes fois depuis son enfance : « A Futeau, on est entouré de bois, mais si on veut une rame à haricots, il faut qu’on la vole ! ». C’est fâcheux en effet.
Là, contrairement à Villers, Verrières et Châtrices, une histoire circule pour expliquer cette absence de forêt communale en val de Biesme. Il se raconte que Napoléon, avec sa grande armée, ait emprunté le défilé des Islettes en partant à la conquête de l’Est. Il aurait voulu bivouaquer dans la vallée de la Biesme, mais la population se serait montrée très hostile, rapport à l’étroitesse du territoire, pour accueillir tous ces hommes et tous ces chevaux. On imagine en effet aisément les désagréments que cela pouvait causer : récoltes saccagées, réserves pillées, actes délictueux des fantassins envers les dames et demoiselles.
La grande armée et son chef seraient donc allés s’installer plus loin, dans la vallée de l’Aire, ou les autochtones se sont montrés plus accueillants. Et ce serait en représailles que par la suite, les communes de la vallée de la Biesme n’ont pas eu de forêt communale quand celles de la vallée de l’Aire se sont vues bien dotées. Légende ou histoire ? Toujours est-il que c’est plausible.

Récemment encore, la mairie de Lachalade pensait intenter une action en justice contre l’Etat pour récupérer la forêt domaniale du même nom, notamment pour que les revenus qui en sont issus puissent financer l’entretien de l’église abbatiale. C’est peine perdue d’avance. Un cas similaire en Haute-Marne a vu la commune d’Auberive déboutée. Il y a sans doute prescription.
Les habitants de la vallée de la Biesme sont-ils définitivement contraints à la culture des haricots nains par la faute de Napoléon ? Là encore, la question est proposée aux historiens et érudits locaux.
Alors, peut-être des éléments de réponse dans le prochain numéro ?

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